Publié le 25 mai 2022Lecture 4 min
Comment l’intelligence artificielle s’inscrit dans les démarches diagnostiques
Caroline GUIGNOT, D’après la session « La pneumologie à l’ère de l’intelligence artificielle » CPLF 2022
L’interprétation des EFR et de l’imagerie thoracique peut être complexe et chronophage. Les algorithmes apprenants peuvent-ils aider, voire supplanter l’expertise humaine ?
Schématiquement, le machine learning ou apprentissage automatique (ML) est une méthode d’intelligence artificielle (IA) qui permet aux ordinateurs d’améliorer leurs performances dans la réalisation d’une tâche à partir des données qui leur sont fournies, l’apprentissage pouvant être ou non supervisé (guidé) par l’humain. Le deep learning ou apprentissage approfondi (DL) est un sous-groupe du ML qui s’inspire du fonctionnement du système nerveux : il consiste en plusieurs couches de neurones artificiels qui communiquent entre elles, chacune étant dédiée à une tâche. Ces interactions conduisent certains réseaux à se développer ou à régresser selon la pertinence de l’information transmise. Ces méthodes analytiques se sont largement développées ces dernières années, non seulement dans le domaine de la recherche mais aussi très rapidement à destination des praticiens, dans leur activité clinique de routine.
Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) constituent l’un des domaines dans lequel ces approches pourraient améliorer la pertinence de l’interprétation des données. Plusieurs études(1,2) issues de la littérature montrent qu’un outil d’IA correctement entraîné aboutit à un diagnostic avec une exactitude supérieure à celle du pneumologue, quel que soit son niveau d’expertise. Mais si ses performances sont supérieures pour accomplir des tâches complexes, elles ne sont pas parfaites car l’outil n’intègre pas la totalité des informations qui lui seraient utiles. Aussi, en pratique, plutôt que de supplanter l’intervention diagnostique du pneumologue, la collaboration entre les deux pourrait aboutir à un meilleur résultat : l’IA proposant des diagnostics alternatifs au médecin, que ce dernier valide ou non, au vu de son propre diagnostic, ses connaissances et de tous les autres éléments cliniques.
Radiologie : attention aux faux positifs
En radiologie, les deux approches coexistent également : celle du ML, dans laquelle l’image est décrite à la machine, qui interprète cette description pour former un outil algorithmique apte à conduire les analyses de façon automatique ; et celle du DL qui nécessite une très large base de données à partir de laquelle l’IA va elle-même bâtir son interprétation. Plusieurs logiciels d’aide à la lecture existent ou sont en développement pour aider à la recherche de nodules à l’imagerie thoracique. L’une des difficultés de ces outils est liée à la fréquence des faux positifs qu’ils identifient à la radiographie et, encore plus fortement, au scanner. Aussi, l’interprétation de l’imagerie ne peut être laissée seule à l’outil d’aide dont le résultat est soumis à l’humain. Fait intéressant, l’interprétation diagnostique du praticien à la lumière de celle de l’IA permet d’en améliorer l’exactitude, et de réduire les faux positifs, quel que soit le niveau d’expérience du praticien(3,4). Dans ce contexte, l’étude CASCADE (dépistage du CAncer du poumon par SCAnner faible DosE) débute en France pour évaluer l’implémentation d’un outil d’IA dans le lecture de l’imagerie par un expert formé au dépistage, versus une double lecture. D’autres outils de ML semblent également performants pour établir la nature bénigne ou maligne de la tumeur, sur la base de variables spécifiques de la tumeur ou de son environnement(5,6). Une approche « tout en un » (diagnostic + caractérisation) a été décrite comme étant plus performante que l’interprétation des clichés par le praticien, même si la précision atteinte par ce dernier est aussi élevée que celle de l’IA s’il dispose des anciennes imageries du patient(7). Enfin, d’autres outils d’IA sont mis au point pour prédire la réponse à l’immunothérapie, à la radiothérapie ou à la chirurgie à partir de l’imagerie, mais leur précision reste pour l’heure insuffisante.
Hors oncologie, de nouvelles approches diagnostiques d’IA existent aussi pour aider au diagnostic des PID (pneumopathies interstitielles diffuses), à leur pronostic (quantification de la sclérodermie)(8), la caractérisation de l’étiologie de la fibrose pulmonaire idiopathique(9) ou encore pour identifier des phénotypes morphologiques, ou mieux, quantifier l’atteinte pulmonaire et l’efficacité des traitements dans la mucoviscidose(10,11). In fine, la pandémie de Covid-19 a été l’occasion de voir une multitude de démarches d’IA se développer pour aider les praticiens dans la prédiction du pronostic et du risque de complications.
Aussi, l’IA constituera certainement une aide précieuse dans la détection, la quantification et la classification des anomalies à l’imagerie thoracique, et va aider à établir de nouveaux biomarqueurs. Mais la supervision humaine reste incontournable.
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